Optimisation fiscale : l’IFI rebat les cartes
À l’instar de la flat tax, le remplacement de l’ISF par l’IFI bouleverse le paysage fiscal français et modifie les stratégies d’optimisation patrimoniale mises en place du temps de l’ISF. Décryptage par Jean-François Lucq, responsable de l’ingénierie patrimoniale de KBL Richelieu.
Les contribuables qui étaient jusqu’alors assujettis à l’ISF, verront diminuer de façon naturelle leur assiette taxable.
Cette chute sera plus ou moins forte selon la proportion d’actifs financiers dont ils disposent ou si le redevable procède à des arbitrages d’actif immobiliers au profit de réinvestissements financiers.
Concernant les «ventes à soi-même», le législateur a prévu un dispositif anti-abus, visant à neutraliser la dette bancaire contractée par la structure d’acquisition. Néanmoins, si tout ou partie des parts de cette nouvelle structure (le plus souvent une SCI) est transmise en pleine propriété ou en usufruit à d’autres membres du groupe familial, le foyer fiscal verra son assiette baisser, avec pour contrepartie une augmentation de l’assiette IFI des bénéficiaires.
Privilégiez un financement avec la dette
Concernant de nouvelles acquisitions immobilières du foyer fiscal, il sera judicieux de privilégier un financement avec de la dette, et des acquisitions par le biais de sociétés civiles.
À ce jour, la dette in fine contractée par une SCI n’est pas visée par le dispositif de réintégration linéaire dans l’assiette taxable, qui joue en revanche en cas d’acquisition directe.
En point négatif, l’administration fiscale a modifié sa position sur la dette bancaire afférente à la résidence principale, indiquant qu’elle devait faire l’objet d’un abattement de 30%, au même titre que l’actif financé.
Davantage de contrôle sur la valeur des actifs immobiliers
Enfin, les foyers qui bénéficiaient jusqu’alors du plafonnement de l’ISF vont retrouver une marge de manœuvre dans la gestion de leurs actifs.
En effet, il était jusqu’alors difficile pour eux de procéder à des arbitrages d’actifs sans conséquences négatives sur leur revenu de référence. Les gains réalisés rehaussant ce revenu, 75% pouvaient en être appréhendés par l’impôt, du fait du déplafonnement de l’ISF.
Avec un impôt sur le patrimoine beaucoup plus faible, les contribuables bénéficieront plus rarement du plafonnement, mais l’impôt se limitera à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, voire, pour les gains les plus conséquents, à la CEHR de 3-4%.
En contrepartie, les contribuables vont pouvoir arbitrer plus librement leurs actifs financiers et leurs contrats d’assurance vie, s’ils ne sont pas satisfaits des performances de leurs gestionnaires.
En conclusion, il importe de garder à l’esprit que les contrôles de la valeur des actifs immobiliers risquent d’être plus rigoureux.
L’obligation (nouvelle) d’indiquer dans la déclaration la date et le prix d’acquisition des biens immobiliers sera pour elle un élément précieux pour apprécier, puis contester, les variations de valeur telles que décrites par les contribuables.
Quid des dirigeants actionnaires ?
D’abord, un sujet de contentieux en matière d’IFI disparait. Jusqu’alors, les holdings étaient sujettes à des interprétations divergentes entre l’administration fiscale et les dirigeants / actionnaires.
Lorsque l’administration remettait en cause le caractère animateur d’une holding, le risque était une réintégration de la holding dans l’assiette ISF, avec une imposition conséquente.
Le débat n’a désormais plus lieu d’être, puisque tous les actifs financiers, professionnels et boursiers, sont maintenant exonérés d’IFI.
Par ailleurs, comme pour les particuliers, les distributions de dividendesauront une incidence sur le revenu de référence des actionnaires / dirigeants, mais les conséquences en seront amoindries, du fait que l’impôt sur le patrimoine se limite désormais aux actifs immobiliers.
Enfin, la problématique de l’ISF post-cession disparait. En effet, dans le régime actuel, la transformation de l’outil professionnel (jusqu’alors exonéré d’impôt) en liquidités ne va générer aucune augmentation d’assiette taxable.
Ce n’est qu’à hauteur des réinvestissements immobiliers post-cession que l’assiette sera modifiée. Il y a là une arme anti-délocalisation évidente.
Une réforme d’envergure, qui n’a pas fini de faire couler d’encre.