Et si les maires réhabilitaient les immeubles à l’abandon pour compenser la taxe d’habitation

Défiscalisation, Loi Malraux, Monument historique
27/07/2017

(Article disponible par lien sur le site Challenges en bas de page)

TRIBUNE Pour Renaud Deneux, directeur du développement du groupe Buildinvest, spécialiste de l’immobilier de rénovation, les municipalités peuvent compenser la diminution prochaine des recettes de la taxe d’habitation par des projets réhabilitant des immeubles anciens.

Malraux, Monuments Historiques… Ces dispositifs immobiliers sont surtout mis en avant pour leurs bénéfices en faveur des investisseurs. Aujourd’hui, arrêtons-nous sur ce qu’ils peuvent rapporter aux municipalités dont certains immeubles vieillissent mal.

Nous sommes tous passés dans certaines villes en se disant qu’elles ont du charme mais que certains quartiers ou immeubles auraient besoin d’être rafraîchis. Un immeuble à l’abandon coûte de l’argent à une municipalité, surtout en entretien. Il peut aussi être une source de nuisances et d’incivilités s’il est squatté. A cela s’ajoute la perte annoncée de la taxe d’habitation, estimée à plus de 9 milliards d’euros, qui représente souvent plus de 30% du budget des municipalités. Dès lors, elles doivent rapidement trouver de nouvelles sources de revenu pour rester attractives.

Restituer l’harmonie visuelle des quartiers

L’attraction passe par l’image qu’on renvoie aux visiteurs et aux habitants. Un immeuble à l’abandon proche du centre-ville ou dans un quartier dit  » historique  » peut donc être une opportunité à saisir. En le réhabilitant, c’est tout le quartier qui reprend de la valeur et retrouve son âme.

En effet, la réhabilitation d’immeubles anciens implique une restauration à l’identique, faite sur la base de plans et de photos de l’époque. Elle doit aussi répondre aux contraintes des Architectes des Bâtiments de France. Ainsi, les habitations disposent de tout le confort moderne (VMC, parties communes, double vitrage…) tout  en retrouvant leur lustre passé, puisque les matériaux utilisés sont les mêmes que ceux d’origine.

Les subventions, qui accompagnent parfois ces projets de réhabilitation, permettent aussi aux investisseurs de proposer des loyers plus bas pendant plusieurs années. Ainsi, cela permet de répondre à la demande locative et de repeupler certains secteurs laissés à l’abandon.

Des retombées économiques pour les municipalités

Au-delà de l’aspect visuel du quartier, de nombreux facteurs interviennent et créent une dynamique économique. Les travaux de rénovation sont réalisés par des entreprises locales en priorité et génèrent donc de l’emploi. La ville récupère de la taxe foncière supplémentaire. Les nouveaux locataires sont aussi des consommateurs susceptibles de réaliser des achats en centre-ville, aidant ainsi les commerces de proximité à rester compétitifs par rapport aux grands centres commerciaux situés en périphérie. Si les appartements proposés sont suffisamment grands pour accueillir des familles, cela peut permettre de maintenir des classes dans les écoles, voire d’en ouvrir de nouvelles. Bref, c’est un cercle vertueux.

Evidemment, si la municipalité est propriétaire de l’immeuble à rénover, les retombées économiques sont importantes. Si elle ne l’est pas, elle a quand même tout intérêt à inciter le propriétaire à réhabiliter son bien, car la ville sera également gagnante dans cette opération.

Quelques exemples de réhabilitations en cours

L’exemple le plus significatif est à le projet de Châtellerault. C’est tout l’Ilot des Cordeliers qui est en cours de réhabilitation, sous l’impulsion de la municipalité. Situés Quai Napoléon 1er, en plein cœur historique de Châtellerault, 8 immeubles sont en cours de restauration à l’identique. Les moulures, les finitions, les balcons ou encore la qualité de la pierre de Tuffeau sont repris intégralement.  La plupart des 25 appartements ont trouvé des investisseurs, qui vont réaliser une belle opération de défiscalisation, mais aussi proposer des loyers intermédiaires, à partir de 300 € par mois, grâce à la subvention accordée par l’ANAH. Des familles pourront y accéder puisque treize T3 et T4 répondant aux contraintes des Architectes des Bâtiments de France, comme le veut la loi Malraux, sont proposés. La proximité du centre-ville profitera aussi aux petits commerçants.

On peut également parler de Bayeux, dont l’ancien Collège Jeanne d’Arc était à l’abandon depuis 2011. En lieu et place, c’est une dizaine de logements qui verront le jour en 2019.

Des villes comme Bordeaux, Strasbourg ou encore Honfleur sont redevenues des pôles d’attraction touristiques et économiques en misant sur la rénovation de leurs quartiers historiques. Ces exemples sont applicables à toutes les municipalités disposant de biens immobiliers, puisqu’un immeuble est un capital qu’il faut faire fructifier, au risque de le voir dépérir au détriment de l’image et de l’attractivité de la ville.

Par Renaud Deneux, directeur du développement du groupe Buildinvest, spécialiste de l’immobilier de rénovation