Redécouvrir le dispositif d’investissement locatif Malraux

Défiscalisation, Loi Malraux
24/12/2019

Boudé par le grand public, ce mécanisme permet de faire baisser ses impôts en achetant, rénovant et en mettant en location des immeubles anciens, mais il est difficile de dénicher le bien idéal.

André Malraux fut le ministre de la culture du général de Gaulle de 1959 à 1969, mais il a aussi laissé son nom à un avantage fiscal. « C’est le dispositif plébiscité par les investisseurs dans l’ancien qui aiment les belles pierres et sont allergiques à l’immobilier neuf », définit Loïc Guinchard, directeur commercial chez Buildinvest , un groupe spécialisé dans l’immobilier de rénovation et de défiscalisation immobilière.

C’est le cas, par exemple, des investisseurs ayant participé à la transformation du couvent Saint-Joseph. Une bâtisse du XIX e siècle, située dans le centre ancien de Senlis (Oise), classé « secteur sauvegardé ». Le bâtiment est depuis devenu un immeuble de 46 logements. « Les immeubles éligibles au Malraux ne sont pas tous exceptionnels, mais le quartier présente toujours un intérêt historique ou architectural, concourant à l’unité patrimoniale de la ville. C’est en quelque sorte la crème de l’immobilier ancien » , ajoute Rodolphe Albert, président d’Histoire & Patrimoine, une filiale du groupe Altarea Cogedim.

Appliquée depuis 1962, la loi Malraux permet à un investisseur de faire baisser ses impôts en achetant, rénovant et en mettant en location pendant neuf ans des biens immobiliers localisés sur des secteurs bien précis. Ainsi, pour profiter de la baisse d’impôt de 30 % des travaux payés, la propriété doit se situer sur un site classé « secteurs patrimoniaux remarquables » (SPR), avec un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) approuvé, au sein d’un quartier identifié à la fois comme « quartiers anciens dégradés » (QAD) et « nouveau programme national de renouvellement urbain » (NPNRU).

Cinq cents opérations par an

Les bâtiments implantés sur un territoire couvert par un plan de valorisation de l’architecture et du patrimoine (PVAP) dont la restauration a été déclarée d’utilité publique offrent, eux, une baisse d’impôt de 22 % sur le montant des travaux. « Ce sont ces classifications spécifiques qui font parfois peur aux acheteurs, mais ils n’ont pas à s’inquiéter. Il leur faut juste trouver le bon opérateur. Ce dernier vérifie si le bien et les travaux nécessaires sont éligibles au Malraux avec l’appui de son cabinet d’avocats » , rassure Loïc Guinchard.

Très confidentiel (environ cinq cents opérations sont réalisées chaque année), le dispositif n’en reste pas moins attractif : « Il est possible de réaliser jusqu’à 400 000 euros de travaux pendant quatre ans. Sur une même année, un investisseur peut profiter d’une réduction d’impôt maximum de 120 000 euros par an. Depuis 2017, l’investisseur peut étaler sur trois ans la réduction d’impôt non imputée l’année de la réalisation des dépenses. Le dispositif n’est pas concerné par le plafonnement des niches fiscales de 10 000 euros, et on peut le cumuler avec d’autres mécanismes fiscaux » , explique Marcelina Stark, directrice associée d’Angelys Group. C’est le cas par exemple du régime de déficit foncier.

Si le montant de ses travaux est supérieur à ses revenus locatifs, l’investisseur déduit de ses impôts la différence entre les deux sommes. « Il faudra tout de même séparer l’acquisition du bien de la réalisation des travaux en passant par une association syndicale libre [une sorte de syndicat de copropriété, en moins réglementé] au moment de l’achat » , précise-t-elle.
Des conditions de défiscalisation qui destinent le Malraux aux particuliers les plus imposés : « Dès que l’on atteint une tranche marginale d’imposition supérieure à 41 % ou si l’on est amené à recevoir une prime mportante tous les ans, se tourner vers le Malraux a un grand intérêt » , indique Elpidio Balbona, conseiller en investissement immobilier chez K & P Finance.

Pas de plafond de loyer

Les travaux éligibles au Malraux (transformation d’une pièce, reconstruction du toit, des murs…) visent à remettre le bien aux normes en le rapprochant des performances de l’immobilier neuf sur le plan énergétique. « Plus le coût du foncier est bas, plus les travaux sont importants et plus la déduction fiscale est intéressante. Mieux vaut se tourner vers un bâtiment où le foncier représente 20 % de la somme investie et les travaux 80 %, que l’inverse. En moyenne, le coût d’une opération en Malraux, travaux compris, avoisine les 233 000 euros chez nous » , précise Loïc Guinchard.

L’arrêté du 19 janvier 2018 dresse la liste des quartiers et habitats dégradés donnant droit à la réduction d’impôt. Contrairement au dispositif Pinel, il n’y a pas de plafond de loyer prévu par la loi Malraux. Toutefois, les perspectives de rendement sont loin d’être mirobolantes : « Dans les grandes métropoles, le niveau de rendement est estimé entre 2 % et 2,5 % hors défiscalisation. Dans les villes de taille moyenne, telles que Perpignan, Nîmes ou Avignon, nous sommes plutôt entre 3 % et 4 %. Les rentabilités sont plus importantes sur les petites surfaces » , précise Marcelina Stark.
L’investisseur devra aussi être très vigilant quant aux choix du professionnel avec lequel il compte travailler : « Le programme doit impérativement comporter une garantie financière d’achèvement et prévoir de rénover les éléments importants de l’immeuble (toiture, façade, planchers). Concernant la toiture, par exemple, élément principal pour la pérennité de l’immeuble, il importe de réaliser une réfection complète et non une simple révision, laquelle occasionnera des travaux supplémentaires après quelques années », indique ainsi Rodolphe Albert.

Des garanties prévues par le contrat de vente d’immeubles à rénover (VIR, article L262-1, code de construction et de l’habitation), qui encadre ce type d’investissement. « L’acheteur doit aussi vérifier la solvabilité de l’entreprise qui réalise les travaux, son savoir-faire dans le domaine de la restauration de l’entreprise sans oublier de regarder la date d’obtention du permis de construire. C’est elle qui déterminera la durée de défiscalisation possible », conseille Marcelina Stark. Des points essentiels pour réussir son Malraux.

5 000 euros C’est le ticket d’entrée pour investir en Malraux au travers d’une société civile de placement immobilier (SCPI). La réduction d’impôt est applicable dès l’année de souscription et est exclue du plafonnement des niches fiscales. En moyenne, il faut compter quatre à cinq années à partir de la date de création de la SCPI avant qu’elle ne distribue des revenus fonciers. Pour les SCPI Malraux, le niveau des rendements oscille entre 0 et 1,5 %. « En fin de vie de ces SCPI, généralement treize à quinze ans plus tard, la plus-value est calculée sur la différence entre le prix d’achat hors travaux et le prix de vente, et est imposable. En d’autres termes, si les travaux qui certes ont procuré un avantage fiscal à l’entrée ont permis de générer une plus-value et donc de mieux vendre le bien, cette plus-value est fiscalisée lors de la revente » , précise Barbara Salomon Prolhac, responsable marketing chez Meilleurescpi.com